Rosalie… la vie dans le village d’à côté…


Rosalie, elle n’avait plus qu’une année de scolarité à finir et elle pourrait aider ses parents pour l’élevage et la préparation des viandes pour la boucherie de l’oncle où sa maman travaillait. D’un geste timide de la main, Pierre la salua rapidement ainsi que sa maman et lui glissa quelques mots à l’oreille, certainement gentils, car Rosalie souriait quand il s’en alla en sautillant sur le chemin vers sa maison… Le papa de Rosalie était éleveur. Dans la famille on comptait au nombre des différents oncles, un boucher-charcutier et cela donnait aux parents de Pierre un intérêt pour vivre bien de leur activité journalière, car bien sûr le boucher était leur client.

En ce temps là, la boucherie du village était quelque chose de très important car le boucher, non seulement faisait son travail de charcutier, mais très souvent c’était lui qui tuait les bêtes, vaches, bœufs, taureaux, cochon, que les particuliers qui en avaient les moyens, élevaient dans leurs petites étables et dépendances modestes que leur mettait aussi à disposition, l’usine.

Le boucher du village de Pierre et Rosalie, était un homme d’origine germanique et très droit dans sa carrure et son métier. Il fallait demander bien tôt dans la saison des cochonnailles pour réserver sa présence lors de l’abattage et du dépeçage du cochon. Et ce jour là c’était presque cérémoniel, rituel. Tôt le matin vers 6 heures, le propriétaire de la bête, en l’occurrence le papa de Rosalie, se levait et faisait bouillir un maximum d’eau chaude pour remplir l’espèce de « brancard à cuvette » en bois, une auge rectangulaire à bras, servant à la déplacer à quatre. Le cochon, une fois saigné, était lavé et brossé avant d’être dépecé et remis en morceaux dans l’auge. Oui, on peut le dire, que c’était un peu barbare tout cela, mais c’est pour manger, alors personne non plus ne relevait le fait que les enfants assistaient au « spectacle ».

Le cochon hurlait, se débattait rudement, maintenu par quatre gaillards du village, le papa de Rosalie entre eux, mais cela ne durait guère longtemps, le boucher avait le coup de main, le bras assuré pour l’assommer d’un coup bien placé avec une masse et ensuite tranquillement pour ne poignarder qu’une fois, à l’endroit précis… Aujourd’hui, on ferait un débat politico-religieux sur cette manière de « tuer le cochon » mais à cette époque là c’était une fête pour tous !

Rosalie et Pierre se tenaient quelque peu à l’écart et, à les observer, ils n’avaient pas vraiment d’intérêt pour ce qui se passait, ils riaient ensemble aux blagues de Pierre et de ses petits copains, il y avait là aussi le frère ainé de Rosalie, un bonhomme bien en chair pour son âge, on lui avait d’ailleurs affecté le surnom de « Klotz », le bloc, aussi qualifiable, mais dans son cas avec extrême gentillesse, de « rustre ». Il était vraiment d’un seul tenant, et ce jusque loin dans sa vie. Je me souviens de lui, alors qu’il s’était expatrié vers le travail dans les aciéries de Lorraine…nous y reviendrons aussi…

Entretemps le cochon ayant rendue l’âme, le boucher s’affairait avec moult couteaux et hachettes, à le ciseler, dégraisser et découper en parts.  Le sang récupéré lors de l’égorgement refroidissait dans les seaux en acier galvanisé et attendait que les femmes aient fini de laver les boyaux pour s’en servir et, avec le sang cuisiné et assaisonné, agrémenté avec des tout petits morceaux de lard frais, confectionner le boudin noir et la saucisse de sang, le « Schwartzwurst » une spécialité lorraine que l’on fumait ensuite… Certaine femmes du village étaient de vraies professionnelles de cette charcuterie. Elles étaient habituées à confectionner de la charcuterie avec tout ce qui est bon à manger dans le cochon. Une tante faisait les pâtés de tête, une autre les pâtés de foie et tout le monde aimait manger ces charcuteries traditionnelles et très goûteuses. La langue du cochon après que le boucher l’ait parée, était en général cuite le jour même des cochonnailles, elle ne se conservait pas bien sauf en la salant, mais il fallait bien nourrir les participants alors tout ce qui était « cuisinable » de suite passait à la casserole au bon gré de tous les présents.

Le boucher ne s’en allait pas avant d’avoir paré les jambons pour le fumoir, ces derniers allaient être salés dans l’auge en bois, en compagnie des pièces de lard des côtes et de quelques bonne pièces que l’on allait ainsi garder pendant des semaines dans les caves. Un schnaps finissait le partage et un bon café – chicorée, certains y ajoutaient un peu de vin rouge pour la digestion… la fête se finissait et le cochon était déjà oublié….

…/…
à suivre

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6 commentaires pour Rosalie… la vie dans le village d’à côté…

  1. noelle dit :

    Juste un essai….

  2. domidoume dit :

    concluant !?
    bonne semaine

  3. noelle dit :

    Oui, je vais revenir te lire ! bonne journée !

  4. alsacop dit :

    Hier nous étions dans ce village, remarquable endroit, les natifs et descendants de l' »histoire » en cours sont très accueillants.
    Admirable salle des ventes, des objets sublimes et décoratifs, dans la vallée constamment un clin d’oeil et des empreintes vers les « Tranches de vie » décrites ici, et cette belle et historique cristallerie, recommandons l’église perchée !
    ….Poursuivre l’écriture de ces tranches de vie passées et si présentes !
    Diverses recommandations si l’envie revenait de publier à nouveau: un repère dans la colonne de gauche composé des noms et des liens des personnages, une édition hebdomadaire ou plus, pourquoi pas des notes moins longues….ETC. Annoter une aide à la gestion des commentaires, les valider plus souvent.
    En fait encourager, « donner de la vie » à ces récits, à ce blog, à son auteur, à ses lecteurs.

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